La recherche montre que « les adultes ayant une incapacité sont quatre fois plus probables que les adultes sans incapacité à déclarer avoir un état de santé moyen ou mauvais »1. Ces proportions sont semblables au Nouveau-Brunswick, où les résultats de l'édition 2020 du Sondage sur la santé primaire réalisé par le CSNB indiquent que seulement 12,8 % des personnes ayant une incapacité perçoivent leur santé comme excellente ou très bonne, comparativement à 48,6 % des citoyens sans incapacité.
Note : « Citoyens ayant une incapacité » s’entend du pourcentage de citoyens qui déclarent être parfois ou souvent limités dans le genre ou la quantité d’activités qu’ils peuvent faire à la maison, au travail ou ailleurs, en raison de leur état physique ou mental, ou d’un problème de santé. Ceci inclut les problèmes de santé chroniques, les incapacités liées au développement, à la dextérité, à la flexibilité, à l’ouïe, à l’apprentissage, à la mémoire, à la santé mentale, à la mobilité, à la douleur et à la vue.
Les personnes ayant une incapacité ont des besoins plus importants en matière de santé, mais ceux-ci diffèrent d’une personne à l’autre selon son état de santé 1. En raison de ces besoins plus grands, les personnes ayant une incapacité doivent généralement accéder aux services de soins de santé plus souvent que la population générale2. Cependant, malgré ce besoin plus important, on sait que les personnes ayant une incapacité ont plus de difficultés à obtenir les soins de santé dont elles ont besoin.1,2
Personnes ayant une incapacité au Nouveau-Brunswick : qui sont-elles?
Selon l’édition 2020 du Sondage sur la santé primaire du CSNB, un adulte sur quatre (25,1 %) au Nouveau-Brunswick déclare avoir une incapacité, mais ce chiffre varie d’une région à l’autre de la province (voir la carte ci-dessous). Les trois principales incapacités déclarées au Nouveau-Brunswick sont :
- Les problèmes de santé chroniques : des problèmes de santé ou un état de santé de longue durée qui a persisté ou s’apprête à persister durant six mois ou plus
- Les incapacités liées à la douleur : avoir une douleur qui est toujours présente ou des périodes de douleur qui surviennent de temps en temps
- Les incapacités liées à la mobilité : difficulté à marcher sur une surface plane durant 15 minutes ou en montant et descendant un escalier d’environ 12 marches sans se reposer
Le tableau suivant montre quels groupes démographiques sont plus susceptibles de déclarer une incapacité :
Malgré leurs propres besoins médicaux complexes, 11,3 % des personnes ayant une incapacité sont de proches aidants (elles fournissent des soins de longue durée à domicile à un parent, un partenaire, un enfant, tout autre membre de la famille ou un ami qui souffre d’incapacité, est frêle, âgé ou atteint d’une maladie mentale ou physique) comparativement à seulement 9,1 % de la population générale.
Les personnes ayant une incapacité présentent une prévalence élevée de problèmes de santé chroniques, mais elles ne disposent pas nécessairement des outils requis pour les gérer
Au moins cinq personnes sur dix ayant une incapacité déclarent avoir trois problèmes de santé chroniques ou plus. Les principaux problèmes de santé chroniques déclarés par les personnes ayant une incapacité sont :
• La douleur chronique (46,6 %)
• L’hypertension (44,4 %)
• L’arthrite (41,5 %)
Malgré cette haute prévalence :
- Seulement trois sur dix (29,6 %) déclarent être très confiantes par rapport à leur capacité de contrôler et gérer leur état de santé
- Seulement quatre sur dix (42,1 %) sont fortement d’accord qu’elles connaissent l’effet de chacun de leurs médicaments prescrits
- Au moins une personne sur dix (15,0 %) déclare qu'il leur est toujours ou habituellement difficile de comprendre l'information écrite concernant une prescription pour un médicament ou leur état de santé
Les personnes ayant une incapacité ont plus de besoins en matière de santé mentale
Compte tenu du niveau de maladie plus élevé que connaissent les personnes ayant une incapacité, il n’est pas surprenant que leur principale cause de stress soit un problème ou une condition de santé physique (rapporté par 57,4 % d’entre elles), suivi de la santé des membres de leur famille (48,9 %) et de leur situation financière (40,2 %).
L’exposition à des niveaux de stress élevés, en plus du fait que les personnes ayant une incapacité déclarent se sentir plus seules que les autres, avoir un plus faible sentiment d’appartenance à leur communauté et avoir une plus faible satisfaction à l’égard de leur vie (voir tableau ci-dessus), fait en sorte qu’elles sont plus susceptibles d’avoir des besoins en santé mentale élevés. En fait, seulement 30 % des personnes ayant une incapacité perçoivent leur santé mentale ou émotionnelle comme étant excellente ou très bonne, comparativement à 50 % de l’ensemble des Néo-Brunswickois. De plus, 25 % d'entre elles déclarent avoir un besoin perçu en matière de services de santé mentale ou de traitement des dépendances.
Les personnes ayant une incapacité ont des besoins de santé complexes qui entraînent une plus grande utilisation des services de soins de santé
Au Nouveau-Brunswick, les personnes ayant une incapacité ont plus tendance à avoir des besoins médicaux complexes qui, pour être comblés de façon coordonnée et efficace, exigent plus de services sociaux et de santé. Si leurs besoins ne sont pas comblés, ces personnes deviennent plus vulnérables et leurs problèmes s’aggravent, ce qui fait augmenter davantage la demande de services.
En fait, sur une période d’un an, beaucoup plus de personnes ayant une incapacité que de membres de la population générale ont vu un spécialiste (60,9 % comparativement à 40,6 %) et 37,9 % des personnes ayant une incapacité ont eu besoin d’un test diagnostique dans une situation non urgente comparativement à 21,4 % des Néo-Brunswickois.
Les personnes ayant une incapacité font face au même temps d'attente pour les services de soins de santé, malgré des besoins plus importants
Bien que les personnes ayant une incapacité soient plus susceptibles d’avoir un fournisseur de soins primaires (médecin de famille ou infirmière praticienne) que la population générale (93,2 % comparativement à 89,9 %) et qu’elles aient tendance à aller le plus souvent voir leur médecin de famille lorsqu’elles ont besoin de soins (64,9 % comparativement à 57,0 % pour l’ensemble des Néo-Brunswickois), il reste que 12,5 % d’entre elles ont le plus souvent recours à une clinique après-heures ou sans rendez-vous comme lieu habituel de soins, et 10,6 % vont le plus souvent à la salle d’urgence d’un hôpital.
L’utilisation de ces milieux de soins comme lieux de soins habituels compromet la continuité et l’intégration des soins, deux piliers essentiels d’un secteur de soins primaires approprié et efficace, surtout pour les citoyens ayant des besoins complexes.
Malgré ces besoins plus complexes qui nécessitent un accès en temps opportun, les personnes ayant une incapacité doivent attendre en moyenne le même montant de temps que les autres Néo-Brunswickois pour accéder à certains services :
- Seulement 51,3 % d’entre elles peuvent obtenir un rendez-vous chez leur médecin de famille dans un délai de cinq jours ou moins
- Seulement 65,8 % attendent moins de quatre heures à la salle d’urgence d’un hôpital
- Seulement 38,4 % attendent moins d’un mois pour une première visite chez un spécialiste
- Seulement 51,0 % peuvent obtenir un test diagnostique en moins d’un mois dans un contexte non urgent
Les personnes ayant une incapacité rencontrent davantage d'obstacles pour accéder aux services de santé, notamment pour des raisons financières
Les difficultés à obtenir les soins de santé nécessaires touchent de façon disproportionnée les personnes ayant une incapacité, ce qui peut entraîner des retards dans l’obtention de soins et, par conséquent, retarder leurs traitements 1. Ci-dessous est un tableau illustrant les cinq difficultés principales rencontrées par les personnes ayant une incapacité à recevoir les soins de santé requis au Nouveau-Brunswick.
Les obstacles financiers en général sont la principale barrière signalée par les personnes ayant une incapacité lorsqu’elles tentent d’obtenir les soins de santé dont elles ont besoin. Parmi ces obstacles, mentionnons le fait de manquer un rendez-vous médical, un traitement ou un test, ou encore négliger de faire préparer une ordonnance de médicaments ou de sauter des doses de ses médicaments, en raison du coût. Ceci cause un traitement et des suivis insuffisants, ce qui entraîne des résultats inférieurs pour la santé 3. Cette situation concorde avec le fait que la « situation financière » figure parmi les principaux facteurs contribuant à des sentiments de stress déclarés par les personnes ayant une incapacité.
En plus de rencontrer des obstacles généraux à l’obtention de services de santé, certaines personnes ayant une incapacité rencontrent aussi des difficultés directement liées à leur incapacité : 9,0 % d’entre elles ont de la difficulté à obtenir un équipement médical ou de réadaptation nécessaire et 10,9 % ont de la difficulté à physiquement accéder à un centre de santé.
Environ 25,0 % des personnes ayant une incapacité ont un besoin perçu en santé mentale, mais 24,4 % d’entre elles n’ont pas consulté un professionnel de la santé à ce sujet. Les principales raisons pour ne pas avoir consulté sont les suivantes : le temps d’attente était trop long, ou la personne ne pouvait pas en payer les coûts/l’assurance n’offrait pas une couverture suffisante.
En ce qui concerne les services de soins à domicile, l'édition 2020 du Sondage sur la santé primaire du CSNB indique qu’il existe un besoin considérable de services de soins à domicile chez les personnes ayant une incapacité. En fait, 9,5 % des personnes ayant une incapacité déclarent avoir besoin de services de soins à domicile, mais n’en reçoivent pas, comparativement à seulement 3,0 % des Néo-Brunswickois en général.
Les services fournis aux personnes ayant une incapacité ne répondent pas à leurs besoins et elles sont moins satisfaites
Pour répondre aux besoins des personnes ayant une incapacité, il ne suffit pas d’éliminer les obstacles et de fournir un accès en temps opportun aux services; il faut aussi assurer que les services fournis sont pertinents aux besoins de la personne et s’appuient sur les normes établies.
Si nous examinons l’expérience vécue par les personnes ayant une incapacité avec leur médecin de famille, nous pouvons constater que celles-ci semblent être désavantagées comparativement à l’ensemble des Néo-Brunswickois. Seulement 61,7 % d’entre elles déclarent que leur médecin de famille leur donne toujours assez de temps pour discuter (moyenne pour le Nouveau-Brunswick : 66,9 %) et 27,5 % déclarent que leur médecin de famille limite le nombre de problèmes dont elles peuvent discuter lors d’une visite (moyenne pour le Nouveau-Brunswick : 24,2 %). Les personnes ayant une incapacité sont aussi moins portées à déclarer une communication adéquate avec leur médecin de famille : 70,3 % d’entre elles déclarent que leur médecin de famille explique toujours les choses pour qu’elles puissent comprendre (moyenne pour le Nouveau-Brunswick : 75,7 %) et 65,2 % déclarent que leur médecin de famille les consulte toujours pour prendre des décisions au sujet de leurs soins de santé (moyenne pour le Nouveau-Brunswick : 71,8 %). La coordination des soins joue un rôle déterminant pour les citoyens ayant des besoins médicaux complexes; cependant, les personnes ayant une incapacité ont moins tendance à déclarer que leur médecin de famille les aide toujours à coordonner les soins reçus d’autres fournisseurs (65,6 % comparativement à 68,7 % pour l’ensemble des Néo-Brunswickois).
En gros, l’évaluation favorable des services reçus de son médecin de famille est plus faible chez les personnes ayant une incapacité (76,9 %) que chez la population générale (81,5 %).
En bref
Au Nouveau-Brunswick, un adulte sur quatre déclare avoir une incapacité. Les personnes ayant une incapacité sont plus susceptibles à avoir des besoins médicaux complexes, ce qui entraîne une augmentation de la demande pour divers types de services. Cependant, au Nouveau-Brunswick, les personnes ayant une incapacité sont plus susceptibles de faire face à des difficultés (notamment de nature financière) à recevoir les soins de santé requis. Il en résulte des besoins en matière de santé non comblés pour cette population. Lorsque les personnes ayant une incapacité obtiennent des services de santé, ceux-ci ne sont pas nécessairement adaptés à leurs besoins. « Les personnes handicapées au Nouveau-Brunswick ont besoin d’un soutien pour bénéficier de l’égalité des chances et ainsi démontrer leur plein potentiel comme citoyens qui apportent leur contribution ». 4
Un tableau de données sur l'accès aux services de santé primaires par les personnes avec une incapacité est disponible ici.
Références
- Krahn, G. L., Walker, D. K., & Correa-De-Araujo, R. (2015). « Persons With Disabilities as an Unrecognized Health Disparity Population », American Journal of Public Health, 2(105), 198-206.
- Sakellariou, D., & and Rotarou, E. S. (2017). « Access to healthcare for men and women with disabilities in the UK: secondary analysis of cross-sectional data », BMJ Open, 1-9.
- Parikh, P.B., Yang, J., Leigh, S., Dorjee, K., Parikh, R., Sakellarios, N., Meng, H., & Brown, D. L. (2014). « The Impact of Financial Barriers on Access to Care, Quality of Care and Vascular Morbidity Among Patients with Diabetes and Coronary Heart Disease », J Gen Internal Med, 29(1), 76-81.
- Plan d'action pour les personnes ayant un handicap au Nouveau-Brunswick. (2020, juillet). Repéré de https://www2.gnb.ca/content/dam/gnb/Departments/pcsdp-cpmcph/pdf/publications/DAP-UVREC-2020.pdf , p.7